L'île Logique, pédagogie des spectacles

La question de la transversalité interdisciplinaire est une des principales prérogatives de l’île logique : avec l’objectif d’aider les sciences théoriques à rompre avec l’isolement dans lequel elles sont aujourd’hui, L’île logique aborde, en plus des mathématiques, de la logique et de la physique fondamentale : la littérature, le théâtre, la philosophie, l’histoire des sciences, l’environnement, la jonglerie, les arts (plastiques et musicaux), la question des rapports à l’autorité (scientifique ou non), la pensée critique en général…
Aussi y a-t-il autant d’exploitations pédagogiques possibles des prestations que nous proposons.
On peut lire ici un article portant sur les rapports entre le Clown et les sciences abstraites. Une version plus courte est donnée en bas de cette page.

On peut réintégrer dans un projet pédagogique ce qui a été vu dans les différentes représentations, et cela de plusieurs façons :

-> Le théâtre : sa pratique (monter l’un des spectacles avec un groupe d’élèves, par un travail conjoint entre les professeurs de lettres et les enseignants en sciences). Voir une création ICI
-> Le théâtre, son histoire, son contenu (le jeu théâtral, le travail de l’auteur, des comédiens, la mise en scène, les décors et les costumes, la scène, les coulisses, etc.)
-> L’histoire des sciences (la naissance d’une idée, la hasard des découvertes, etc.)
-> Le discours logique.
-> L’environnement (l’eau, l’air : leur constitution, leur mouvement, leur qualité, leur préciosité…).
-> L’art plastique (Le trompe l’œil, les décors au théâtre, l’importance du dessin en sciences, etc.).
-> La musique (chansons, instruments de musique, chant, travail avec des chorales…).
-> La pensée critique
-> Philosophie : la liberté, l’identité, l’autorité, le savoir, la logique, la place des sciences, etc.
 
-> Propositions d’exercices en rapport avec les spectacles  sur demande.(contact)

-> Grilles d’intégration au programme scolaire :

MATHS ET ART

Où est 17 ? Qui a déjà vu une droite ? Les mathématiques n’existent pas vraiment, mais le Clown non plus… En tant que pures créations de l’esprit, l’art et les mathématiques ont ça de commun de n’être qu’imaginaires, de ne pas exister concrètement. On fait des murs avec des briques et non avec des parallélépipèdes ; une musique, une sculpture, ne sont que des concepts, elles n’ont de sens que si notre imagination leur en donne un ; une émotion n’a pas la même réalité qu’un marteau… Et pourtant on ne peut pas nier leur existence…

Le Clown vient de nulle part, et si il nous ramène étrangement à des situations de la vie réelle, nous savons bien qu’il n’est pas dans la “vraie vie”. Les maths et les concepts fondamentaux de la physique théorique comme le temps, l’espace, la masse ou l’énergie n’existent pas vraiment non plus, ils sont abstraits. Qui a déjà vu une seconde ou un gramme ? Ce point commun d’existence abstraite qu’on trouve entre le clown et les mathématiques fonde la démarche de L’île logique : il s’agit de s’appuyer sur le premier pour transmettre la seconde… et pourquoi pas le gramme.

Absurde, échec, doute et naïveté…

Compter jusqu’à zéro, couper en rien, ranger deux par trois… C’est dans la nature même du clown d’être dans l’inversion. Aussi quand il s’égare dans l’absurde, cette façon de prouver une proposition en démontrant que son contraire est impossible, il suggère logiquement la validation d’une affirmation inverse : aller dans le faux pour faire surgir l’évidence du vrai et permettre au spectateur de comprendre par lui même en dénichant la contradiction… Ces clowns sont bêtes papa, alors que moi j’ai tout compris !

Le clown est naïf. Il tombe dans les pièges et pose les questions que personne n’ose poser par peur du ridicule. Or se questionner naïvement est nécessaire pour savoir ce que l’on sait, savoir ce qu’on ne sait pas, et savoir ce que l’on cherche. Cette ingénuité, reflet de son ignorance, mène aussi le clown vers la curiosité, moteur principal du mathématicien.

Le clown fait peur tout en émerveillant, les maths aussi. Les émotions, indispensables pour pratiquer les mathématiques (le cerveau qui pense et calcule n’est autre que celui qui rit ou pleure) sont relayées par le clown : il montre qu’on peut s’étonner ou s’enthousiasmer pour une équation mais il relativise aussi les craintes et les phobies en les prenant à sa charge : il prend sur lui la peur de l’échec, la culpabilité de l’ignorance, laquelle peut mener à la mise en sommeil de la curiosité.

Car le clown rate. Il est nul, zéro pointé du doigt. Or l’erreur est motrice dans la compréhension, se tromper c’est apprendre. Le clown nous décharge de la honte illégitime de l’échec. Combien d’enseignants disent à leurs élèves : “Si vous ne comprenez pas, c’est de ma faute” ? On a mis plusieurs millénaires pour comprendre la division, n’est-il pas normal de ne pas bien la saisir aujourd’hui à 18 ans ? Et puis la peur fait perdre la confiance en soi…

Alors le clown doute. Il sait qu’il ne sait pas et ne sait pas qu’il sait. Il peut douter positivement, comme un chercheur qui remet en cause, mais il doute aussi de lui même, souvent auto-référentiel comme la preuve de la non dénombrabilité des réels… Avoir de l’assurance, c’est déjà bien se connaître, évaluer ses compétences, remettre en cause son être, avoir de l’assurance c’est douter de soi même… Ou bien : pour être rapide il ne faut pas se tromper, pour éviter les erreurs il ne faut pas se presser, pour aller vite il faut… aller lentement.
On marche sur la tête, heureusement que le monde est à l’envers…

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Enfance, imaginaire, vide et limites…

L’enfant voit aussi bien un triangle que le panneau de la route, un cercle qu’une pièce de monnaie, il ne distingue pas tant le bâton de l’épée, la boule de la balle, il n’a pas besoin de la quantité pour comprendre le nombre : c’est un grand théoricien, il est dans l’imaginaire par nature. Le clown est aussi dans cette enfance (alors que ses spectacles ne sont pas forcément à l’attention des enfants) car il est à sa place dans l’imaginaire. Henri Poincaré, dont nous commémorons le centenaire de la mort cette année, accordait à l’étape intermédiaire du travail du chercheur une importance majeure : une fois le problème et ses difficultés bien posés et avant de formaliser sa preuve, laisser son imagination, sa créativité, voire ses rêves, agir jusqu’à ce que surviennent les idées clef… L’imagination est plus importante que le savoir (A. Einstein).

Comme on reconstruit les mathématiques à partir du vide en théorie des ensembles, le clown part de rien lui aussi. Moins il sait ce qu’il doit faire et mieux il le fait ; c’est l’absence qui lui donne sa consistance, puis l’imaginaire fait le reste, il établit des liens…

Le départ et l’arrivée comptent moins que le voyage. Toute chose n’existe que par les relations qu’elle entretient avec ce qui l’entoure, c’est ce qui nous distingue qui nous fait exister. Si les mathématiques ne sont qu’histoire de relations, c’est tout aussi vrai chez le clown : ce qui nous touche n’est pas tant ce qui a lieu que la façon dont ce dernier va s’en emparer ; pas tant la situation que la façon de la vivre ; les relations au contexte, au partenaire, au public…

Mais le sage connaît le pas sage… alors le clown transgresse, il dépasse les bornes. Il montre les règles en ne les respectant pas, il sort du cadre… Or les mathématiques, cet unique domaine où tout le monde est nécessairement toujours d’accord, s’appuient sur des règles arbitraires, choisies : des règles de déduction permettent de passer des règles-axiomes aux théorèmes. Mais qu’ont fait Riemann, Lobachevsky ou Einstein ? Les plus grands ont toujours montré un point de vue radicalement différent sur le monde, ils sont sortis du cadre. A quand les cours de recul à l’école ?
Un grille-pain en forme de téléphone permet nécessairement de contacter une tartine.

Théâtre et sciences abstraites…

La logique fonde tout raisonnement par sa présence, mais aussi toute situation loufoque en brillant par son absence…

Avec les sciences abstraites comme but et le clown comme moyen, sans se substituer au cours, L’île logique tente de montrer que le jeu du clown, vu comme une catégorie professionnelle des arts dramatiques, a des qualités toutes particulières pour venir à la rencontre des sciences théoriques, que c’est un partenaire pertinent pour la pédagogie des mathématiques, qu’il est possible d’aborder concrètement des sujets tels que la numération, l’énergie, la relativité du mouvement ou du temps, la logique, la géométrie, la mécanique newtonienne, les fonctions, l’infini, les nombres complexes, la théorie de Galois, les travaux de Poincaré, la matérialité de l’air, l’écosystème, les forces, la chaîne alimentaire, l’astronomie, les ondes, la structure de la matière, la nature de la lumière… d’une façon à la fois distrayante et pertinente, absurde et rigoureuse.

Plus on fait n’importe quoi, moins il faut le faire n’importe comment…(1)

(1) : citation empruntée à Bertil Sylvander qui la tenait lui même d’un autre clown…

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